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La BCE prête à desserrer l’étau qui entrave l’économie

La Banque centrale européenne (BCE) fonctionne à la manière d’un énorme paquebot. Très puissante – elle dirige la politique monétaire des vingt pays membres de la zone euro, qui compte 350 millions d’habitants –, elle est aussi difficile à manœuvrer. Au risque d’être trop lente et d’étrangler l’économie européenne ?
Comme pour un paquebot, les changements de cap s’amorcent longtemps à l’avance. Sauf énorme surprise, la BCE devrait réduire ses taux d’intérêt d’un quart de point, de 4 % à 3,75 %, lors de sa réunion jeudi 6 juin. Avec ses méthodes très prudentes, elle a entamé le mouvement dès la fin de 2023, avançant à coups de déclarations calibrées. Désormais, ses dirigeants se sont pratiquement engagés à un geste le 6 juin : Christine Lagarde, sa présidente, évoque une « forte probabilité » d’une baisse des taux ; Luis de Guindos, son vice-président, va jusqu’à parler d’un « fait accompli ».
Il s’agit d’un tournant. A partir de l’été 2022, la BCE a mené le plus fort durcissement monétaire de son histoire. En seulement quatorze mois, le taux d’intérêt est passé de − 0,5 % (il était négatif depuis 2014) à 4 %. Il s’agissait de lutter contre le grand retour de l’inflation, le mandat de la BCE étant de maintenir la hausse des prix autour de 2 % par an.
Pari réussi ? De prime abord, le bilan est satisfaisant. L’inflation, qui a frôlé 11 % en zone euro en octobre 2022, est redescendue à 2,6 % en mai (sur un an). Mais cet atterrissage, malgré un léger rebond en mai, est avant tout mécanique. Les prix se sont envolés parce que les chaînes logistiques se sont déréglées à la sortie de la pandémie, puis parce que le prix du gaz a flambé quand le président russe, Vladimir Poutine, a fermé les vannes des gazoducs à l’été 2022. Ces deux dysfonctionnements sont essentiellement résolus, ce qui a fait retomber les prix, sans que la BCE y soit pour quelque chose.
« Si elle n’avait pas agi, elle aurait été accusée d’être laxiste », réplique Mabrouk Chetouane, responsable de la stratégie à Natixis Investment Managers, une société de gestion d’actifs. Tout le travail de l’institution a consisté à éviter le risque d’un emballement de l’inflation. Philip Lane, le chef économiste de la BCE, cite un exemple : le désordre de la sortie de la pandémie a rendu très chers les matériaux du secteur de la construction, le prix des travaux a donc augmenté et, plus récemment, le prix des assurances immobilières a progressé. « C’est un exemple classique [d’inflation] de troisième tour », explique-t-il au Financial Times. C’est pour enrayer ce genre de phénomène que la BCE a serré la vis.
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